L’intelligence artificielle en mode «overdrive»!

Depuis quelques années, on nous fait part des avancées menées par nos scientifiques dans le domaine de l’intelligence artificielle. Avec les espoirs que cela entraîne mais également les craintes exprimées par plusieurs. Car, quoi qu’on en dise, tout comme la recherche dans le nucléaire a amené la confection de bombes avec une puissance de destruction étonnante, elle a également amené le développement du nucléaire «au service de l’humain» tel les centrales électriques, les isotopes utilisés dans le traitement du cancer,… A cet égard, l’intelligence artificielle pourrait s’avérer une avancée technologique majeure, au bénéfice de l’humanité, ou encore la source de développements apocalyptiques…

Un domaine nouveau tout à fait récent

Ainsi, il y a environ 30 ans, ce qu’on désignait à l’époque comme étant «l’intelligence artificielle» se résumait à développer des «systèmes experts» encapsulant la connaissance d’un individu (à l’intérieur d’un outil informatique) dont le processus de résolution d’un problème («raisonnement») s’apparentait à celui de l’humain. Et, à l’époque, l’approche basée sur les réseaux neuronaux en était à ses premiers pas, freinée par la complexité à reproduire dans les ordinateurs/logiciels la structure même du cerveau via une modélisation de neurones interconnectés par des synapses.

Illustration 3D de neurones interconnectés par les synapses

Or, depuis quelques années, la technologie informatique (matérielle mais surtout logicielle) a fait de grand pas et permet de modéliser les composantes du cerveau (neurones & synapses) à travers des outils informatiques performants en mesure de reproduire les mécanismes d’apprentissage et de résolution des problèmes présents chez l’humain.

Une brève introduction à l’intelligence artificielle basée sur les réseaux neuronaux, ce qu’on dénomme également «l’apprentissage profond» («deep learning»)

De tout temps, le cerveau humain a été l’objet de fascination et les scientifiques n’ont de cesse de tenter d’en comprendre les mécanismes afin, éventuellement, de reproduire le tout dans des «machines» en mesure d’en dupliquer son fonctionnement. Ainsi, contrairement au cerveau d’un animal qui naît avec les «connaissances» de ses parents hérités dès sa naissance, le cerveau d’un nouveau né est «vierge» et n’a «aucun contenu». Il se compose de 100 miliards de neurones interconnectés les uns aux autres par des synapses dont le nombre est estimé à 10 000 milliards d’éléments.

Ainsi, dès son plus jeune âge, l’enfant «programme» son cerveau à travers les expériences qu’il vit à tous les jours. Par exemple, se développe un «canal du danger» qui se ramifie dans un «sous-canal du danger du feu» dès que l’enfant touche une flamme ou un objet très chaud. A travers ses expériences, des «canaux» se programment dans son cerveau et ce processus se poursuit tout au long de la vie de l’individu, comme en témoigne la certification chez des adultes chauffeurs de taxi londoniens qui n’acquièrent ce certificat qu’au prix d’un processus de mémorisation s’étalant sur plus de 4 années.

Au niveau «conceptuel» et afin d’en reproduire les mécanismes de fonctionnement, les scientifiques modélisent le fonctionnement du cerveau à travers la «structure» suivante:

Examinons quelque peu le fonctionnement de ce système mis au point pour reconnaître les lettres qu’on lui présente:

  1. les neurones sont représentés par des «noeuds de mémorisation» lesquels contiendront une «valeur» («chiffre» entre 0 & 1) lorsque l’apprentissage aura été complété dans son entièreté
  2. ces «noeuds de mémorisation» sont interconnectés les uns aux autres, chaque connexion ayant une «pondération arbitraire» lorsque débute «l’instruction» du système

Se présente alors une «lettre» dont on doit faire la reconnaissance, dans ce cas-ci la lettre «a»:

  1. si la réponse vocale est incorrecte ou absente, un mécanisme de rétroaction («feedback») s’enclenche lequel vient modifier la pondération des interconnexions reliant les «noeuds de mémorisation» de façon à ce que l’élément à la sortie correspondant à la lettre «a» ait la valeur maximale, ce qui amènera le locuteur à répondre «a» quand on lui représentera à nouveau la lettre «a» (comme dans le scénario 1) puisque la «note finale» associée à la lettre «a» est la plus élevée (0,8)
  2. on présente par la suite les autres lettres de l’alphabet et le système de rétroaction joue son rôle (i.e. modifier les pondérations) jusqu’à ce que chacune de celles-ci soit reconnues correctement
  3. dans le scénario 2 où la lettre «a» a été présentée à l’élève, dans la mesure où le système a cru reconnaître la lettre «d» en lui attribuant la pondération maximale (0,9), le locuteur énoncera une mauvaise réponse et le système de rétroaction sera enclenché de façon à modifier la pondération entre les «noeuds de mémorisation» pour répondre «a» et non pas «d»

Ainsi, en présentant à l’élève des centaines/milliers de lettres différentes ayant des polices de caractère différentes et en «corrigeant» le système à chaque réponse erronée, à terme le réseau neuronal sera «programmé» pour en arriver à un résultat correct dans tous les cas, comme en témoigne ce tableau présentant les résultats les plus récents de traducteurs informatisés ayant des résultats presqu’identiques à ceux de traducteurs humains professionnels:

Il s’agit donc de la topologie universellement adoptée pour programmer les réseaux neuronaux, que l’on s’adresse à une application médicale (détection de cellules microscopiques de cancer dans les poumons) ou des pronostics boursiers basés sur un historique des titres boursiers, sur le volume des échanges monétaires,…

Un réseau neuronal qui va au-delà de son «maitre» et «apprend» par lui-même

Les technologies entourant le développement de l’intelligence artificielle vont bien au-delà du simple apprentissage basé sur des centaines/milliers de cas soumis au réseau neuronal lors de son «apprentissage». Ainsi, dans le cas d’un système de diagnostic développé à Montréal et «instruit» à détecter des cellules cancéreuses dans les poumons, le système est allé bien au-delà de ce qu’il avait «appris» par les centaines/milliers de radiographies soumises lors de son «apprentissage». Il faut savoir qu’un radiologue examine quotidiennement 30 000 – 50 000 radiographies pour détecter la présence de cellules cancéreuses et que, pour des «taches» inférieures à 2 mm, eh bien cela est au-delà de ses capacités de détection et d’analyse.

Or, un réseau neuronal développé à Montréal par l’équipe de la firme Imagia a su «poursuivre, par lui même, son apprentissage» et est en mesure de détecter des cellules invisibles à l’oeil du radiologue.

Vers une intelligence artificielle s’apparentant au fonctionnement de notre cerveau: un «circuit intégré électronique» conçu à l’image du cerveau humain

Cela étant, les scientifiques ne sont pas en reste de nouveaux développements dans ce secteur. Ainsi, à ce jour, la «connaissance profonde» acquise par des réseaux neuronaux était réalisée au moyen de logiciels informatiques tentant de modéliser/reproduire le fonctionnement du cerveau humain via des «noeuds de mémorisation» et des «éléments de connexion pondérés» reproduits dans ces logiciels.

Or, des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT) ont mis au point des «synapses électroniques artificiels» permettant d’interconnecter des «noeuds de mémorisation» entre eux, le tout réalisé sur une puce électronique, ce qui ouvre la porte à la fabrication de puces électroniques en mesure de dupliquer la structure même du cerveau humain.

 

Artificial synapse creation makes brain-on-a-chip tech closer to reality – ZDNet – 2018-01-23

A terme, tout comme dans le cas des «ordinateurs quantiques» déjà mis en évidence, de tels circuits électroniques seront en mesure de résoudre des problèmes complexes par une analyse «en parallèle et simultanée» de toutes les hypothèses et ainsi résoudre des problématiques impossibles à solutionner par nos ordinateurs actuels les plus puissants.

Craindre ou devenir des «groupies» de l’intelligence artificielle?

Alors, faut-il craindre les avancées de nos scientifiques en matière d’intelligence artificielle?

Ainsi, quoiqu’on en dise, ce domaine continuera à être exploré par nos scientifiques tant les bénéfices attendus sont au-delà de nos attentes les plus «imaginatives». Que ce soit dans le domaine médical, pour le développement de meilleurs matériaux ou la conception d’avions plus performants, que ce soit pour mieux transiger sur les marchés boursiers, rien ne saura arrêter la recherche dans ce domaine tellement les enjeux sont grands et les attentes profondes.

Cela étant, une vigileance accrue sera de mise afin que les avancées dans ce domaine ne soient pas utilisées à mauvais escient, que ce soit dans le secteur militaire ou encore par des gouvernants qui en useront des moyens pour limiter les libertés dans les sociétés qu’ils dirigent. A cet égard, répondant au besoin pressant d’armes toujours plus sophistiquées, la frontière vers l’utilisation de cette technologie à des fins contraires aux intérêts du genre humain pourra être franchie avec grande facilité, pour peu que les sociétés civiles cessent d’exercer la vigileance qui s’impose.

Liens à consulter pour en apprendre davantage

Une série de 5 articles extraits de l’émission Découverte de Radio-Canada:

http://ici.radio-canada.ca/nouvelles/special/2017/02/intelligence-artificielle/voir-vision-apprentissage-profond-reseau-neurone.html

 

Une série de 5 articles présentant une analyse plus appronfondie de ce nouveau domaine de recherche:

https://hackernoon.com/training-an-architectural-classifier-5f1b4f512368

 

Un vidéo très intéressant proposé par le Dr. Juergen Schmidhuber du laboratoire suisse d’intelligence artificielle:

 

Montréal, à l’avant-plan de la recherche en intelligence artificielle alors qu’Amazon et Google y ont installé des équipes de recherche:

http://www.lapresse.ca/debats/editoriaux/francois-cardinal/201702/01/01-5065489-montreal-star-de-lintelligence-artificielle.php